Vers une Didactique de l'Informatique

Silvina Caraballo, Rosa Cicala
 

Résumé

     Le sujet de cet article est une recherche ayant pour objet l'étude de la Didactique de l'Informatique. En partant d'une brève description de la place qu'occupe actuellement l'informatique dans l'enseignement secondaire, nous exposons quelques conditions nécessaires pour réaliser une analyse épistémologique et didactique des contenus qui devraient être enseignés. Notre analyse se limite aux établissements secondaires publics de la Province de Buenos Aires.
     D'abord, nous envisageons l'analyse épistémologique par une recherche sur les représentations de l'informatique induites par l'enseignement. Nous réalisons un bref retour sur l'historique de l'enseignement de l'informatique, avec l'intention de comprendre la genèse de ces représentations et d'identifier les paradigmes qui actuellement se trouvent présents dans l'enseignement et qui, souvent, coexistent dans le même milieu scolaire.
     Ensuite, nous nous intéressons aux deux exigences de base qui concernent le spécialiste en didactique : le choix épistémologique comme cadre théorique de sa discipline, et le problème de la validation comme reconnaissance sociale d'un savoir ; en établissant des relations entre les deux.
     Pour finir, un ensemble de réflexions sont proposées comme éléments de discussion sur la construction du champ de la didactique de l'informatique.
Version en espagnol (Argentine)

Vingt-cinq ans d'enseignement de l'informatique : les paradigmes de son introduction

     Dans notre pays, l'informatique entre dans les établissements secondaires dans les années 80 comme ressource pour l'enseignement des Mathématiques  [1]. Toute proposition didactique à cette époque-là, impliquait le développement de programmes dans un langage de programmation (généralement le BASIC). Pour le professeur de mathématiques, cela a signifié une grande exigence professionnelle alors que :

  • il devait enseigner en même temps deux objets de connaissance de disciplines différentes (mathématique et informatique),

  • il devait apprendre le langage de programmation qu'il devait enseigner, puisque dans sa formation de base, ces connaissances étaient inexistantes,

  • et de plus il devait trouver des propositions didactiques qui justifieraient l'usage de l'ordinateur comme une ressource technologique pour l'enseignement des mathématiques.

     Le projet n'a pas donné les résultats attendus et a laissé comme vision de l'enseignement de l'informatique, l'idée d'une « ressource pour ... ». Le paradigme sous-jacent de l'intégration de l'informatique c'est celui de la programmation.

     En retenant les apports de Susana Muraro on distingue, ensuite, deux paradigmes :

a) Le paradigme des outils, à propos duquel elle écrit : « Le développement des ordinateurs personnels a permis aux écoles d'accéder à des dispositifs de plus grande capacité de stockage et de traitement, et d'intégrer des outils destinés à la production, non pensés pour le milieu scolaire. Il s'est produit un changement significatif de la place de la technologie à l'école. Parce que de réceptrice ou consommatrice, centrée sur le livre imprimé comme support médiateur de l'information, l'école en est venue à intégrer comme technologie éducative les outils informatiques de production. »  [2]

     Ce paradigme a provoqué une tension entre l'enseignement du maniement des outils informatiques et l'emploi de ceux-ci dans les contextes d'autres disciplines. Les situations didactiques scolaires qu'impliquaient les outils répondaient, en général, à une alternative : centrer le propos exclusivement sur l'utilisation des outils « en validant » alors des activités totalement hors du contexte ou bien, à l'opposé, développer des propositions pensées pour travailler sur les contenus d'autres disciplines et, par conséquent sans prendre en compte les connaissances informatiques comme objet d'enseignement, s'intéresser uniquement aux productions réalisées par les élèves.

b) Le paradigme des réseaux étendus et Internet : « À la fin du XXe siècle, la représentation sociale de l'informatique prend un tournant important provoqué par l'apparition des réseaux informatiques associés à la communication à distance. L'emploi du courrier électronique ainsi que l'accès à des sources d'information comme Internet se développent. L'ère des autoroutes informatiques, de la société de l'information et de la connaissance engendre un changement de paradigme social autour de l'informatique. Le précédent modèle présentant la technologie au service du traitement de l'information, peu à peu, perd du poids pour se recentrer sur la technologie au service de l'accès à l'information et à sa transmission. L'informatique est plus appréciée pour la possibilité qu'elle offre de transmettre rapidement des informations numérisées par des réseaux multiples, que pour les techniques et les outils de traitement. »  [3]

     Dans ce paradigme les connaissances informatiques se réduisent à réaliser quelques tâches basiques : chercher sur Internet, communiquer par courrier électronique, chater, etc. L'informatique comme objet d'étude reste basiquement ignorée parce que les savoir-faire s'acquièrent principalement par immersion dans un contexte technologique.

     Cette vision sociale de l'informatique est la plus éloignée de ce qu'est réellement l'informatique, puisqu'elle en souligne seulement une partie. Nous sommes nombreux, préoccupés par l'enseignement de l'informatique, à la considérer comme un signal d'alerte et peut être aussi comme une opportunité de repenser les fondements de notre discipline.

Enseignement de l'informatique, aujourd'hui

     Actuellement, l'intégration de l'informatique dans le secondaire est faible, parce qu'on privilégie les deux paradigmes précédents. Ainsi, l'informatique fournit à l'enseignant divers matériels éducatifs, des outils pour aborder les problèmes propres à sa discipline, des sources d'information numérisées, etc. L'informatique étant prise comme ressource, les préoccupations didactiques du professeur ne tournent pas autour des savoirs liés à l'informatique, son sens (et c'est bien qu'il en soit ainsi) est de donner à l'élève un moyen qui facilite l'apprentissage, de promouvoir une forme déterminée d'approche de l'objet d'étude, etc. Il existe un certain consensus pour supposer que l'emploi de ces ressources laisse chez les élèves un résidu cognitif de connaissance informatique. À notre avis, cette supposition ne tient pas dans la pratique. D'abord, parce que les expériences scolaires qui confrontent les élèves à de réels besoins d'appropriation technologique sont rares. Ensuite, dans le meilleur des cas, si ces situations se produisent, celles qui exigent des connaissances informatiques significatives pour la discipline informatique sont peu nombreuses. Finalement, pour l'enseignant les éventuels apprentissages qui pourraient exister dans l'interaction avec l'ordinateur passent inaperçus et ne nécessitent pas de prévoir des préparations concernant les compétences requises pour l'utilisation de la ressource. Dans la plupart des cas le professeur n'envisage pas comme une des finalités de cette utilisation l'acquisition de contenus informatiques par les élèves. Ainsi, souvent, les élèves qui prennent la responsabilité de mener à bien des tâches requérant l'utilisation de la technologie informatique sont ceux qui ont obtenu, hors de l'espace scolaire, une certaine autonomie dans l'utilisation de l'ordinateur. Ces situations mènent à accroître les différences par rapport à l'appropriation de la technologie et provoquent encore plus d'inégalités dans les opportunités éducatives des élèves.

     En ce sens, nous sommes d'accord avec Jean-Michel Bérard, qui affirme que : « L'utilisation d'un outil, si fréquente et diversifiée soit-elle, ne porte pas en elle-même les éléments qui permettent d'éclairer sa propre pratique. »  [4]

     Nous considérons donc qu'un espace disciplinaire où l'on aborde l'informatique comme objet d'étude est nécessaire. Mais cela implique aussi de réfléchir à une didactique spécifique pour l'enseignement de l'informatique, avec un cadre théorique, des méthodologies propres, des problèmes de recherche à traiter, etc.

Qu'entend-on par informatique ?

     Quand nous avons commencé à penser à cette communication le propos initial était d'inscrire une didactique de l'informatique dans la théorie de la transposition didactique. Chevallard, son auteur, déclare :
« Au sens restreint, la transposition didactique désigne alors le pas du savoir savant au savoir enseigné. Mais la spécificité du traitement didactique du savoir peut se comprendre mieux à travers de la confrontation de deux termes, de la distance qui les sépare (...) C'est précisément le concept de transposition didactique qui permet l'articulation de l'analyse épistémologique avec l'analyse didactique, et se transforme alors en guide de la correcte utilisation de l'épistémologie pour la didactique. »  [5]

     Le processus que décrit Chevallard requiert d'identifier clairement le champ d'étude de l'informatique. Dans l'étape de recherche de l'état de l'art de l'informatique, nous constatons qu'un premier obstacle pour l'étudier comme discipline réside dans le fait que c'est un champ en constante évolution. Alors, nous nous demandons : Est-ce une science ?, Est-ce une technologie ?, Est-ce une méthodologie ?, Est-ce un ensemble de systèmes d'information ?, Est-ce plus ?

     Le rapport d'ACM, « Orientations pour les programmes de degré pour les carrières en Informatique »  [6], répond à ce questionnement en précisant :
« Au sens large, nous pouvons définir l'Informatique comme une quelconque activité qui intègre les ordinateurs. L'informatique inclut : dessin et construction de hardware et de systèmes de software pour tout projet ; organisation et traitement de divers types d'information ; études scientifiques utilisant des ordinateurs ; systèmes d'intelligence artificielle ; création et mise en oeuvre de moyens de communication et de loisirs ; recherche et compilation de l'information pour des sujets spécifiques ; etc.
Virtuellement, la liste est sans fin et les possibilités sont très vastes. L'informatique adopte aussi d'autres signifiés plus spécifiques selon le contexte dans lequel le terme s'utilise. Par exemple, un spécialiste en systèmes d'information verra l'informatique d'une manière différente de celle d'un ingénieur en software. Dans certains contextes, le travail informatique peut être complexe et difficile. La société a besoin de personnes qui développent ces tâches, pour cela nous ne devons pas penser l'informatique seulement comme une profession, mais aussi comme une discipline. »

     Dans la délimitation du champ d'étude auquel nous faisions référence, nous trouvons une diversité de perspectives qui exposaient différentes visions de l'informatique. En choisir une, celle que propose ACM, a été de faire un choix épistémologique.

     Le spécialiste en didactique de l'informatique ne peut pas échapper au besoin de réaliser un choix épistémologique, en précisant l'objet d'étude de la science et son fonctionnement. Quel que soit ce choix, celui-ci fera partie des fondements théoriques de la didactique.

     En suivant les idées de Chevallard, le spécialiste en didactique est confronté à l'opposition entre son choix épistémologique et celui qui apparaît comme légitime aux yeux de la société. C'est à dire qu'il se voit interpellé par le jeu dialectique d'une option justifiée par son positionnement à propos de la connaissance même, tandis que conjointement on doit admettre l'obligation d'obtenir la reconnaissance sociale.

Le problème de la légitimation

     Tant le choix épistémologique que la légitimation sociale supposent une contextualisation du lieu, leur conjonction se verra affectée par le contexte même.

     Globalement, on peut identifier deux visions sociales : informatique associée aux compétences professionnelles ou informatique comme une discipline scientifique.

La légitimation de l'informatique dans des espaces disciplinaires pour la formation professionnelle

     L'informatique comme compétence professionnelle se voit immergée dans un grand nombre de professions. On a créé des professions (Analyste de Systèmes, Ingénierie en Informatique, etc.) et on a modifié les modalités du travail d'un grand nombre et une large variété d'autres (le dessin assisté par ordinateur a une forte incidence sur les professions comme Architecture, Ingénieries, etc. ; l'automatisation du calcul a une incidence sur les professions associées au secteur comptable et aux sciences expérimentales, etc.). C'est la vision sociale prédominante « informatique comme outil pour... ».

     L'enseignement secondaire arrive à satisfaire ponctuellement cette vision dans les milieux de formation technico-professionnelle. Par exemple, dans les écoles techniques dépendant de la cité de Buenos Aires spécialisées dans le calcul, dans les Parcours Techniques Professionnels de la Province de Buenos Aires avec un titre de « Technique en Informatique Personnelle et Professionnelle », articulé avec le Polimodal  [7], dans les modules Économie et Gestion des organisations et les Production de biens et services, etc. Dans ces écoles où il existe des espaces disciplinaires, des professeurs sont en charge de l'enseignement de « l'informatique ». Mais, d'une école à l'autre, il existe aussi une grande hétérogénéité des contenus informatiques abordés, des perspectives, des possibilités réelles d'accès à la technologie informatique, etc. Ainsi, actuellement il est possible de trouver parmi les élèves diplômés avec le même profil de formation, c'est à dire, avec le même degré formel d'enseignement reçu, une grande diversité dans les compétences acquises, considérées institutionnellement comme basiques et minimales.  [8]

     Dans cet espace, la reconnaissance de l'informatique provient des demandes sociales associées au marché du travail et des professionnels. En ce sens, nous reprenons une partie des résultats d'une recherche réalisée par Daniel Filmus, dans le contexte des écoles secondaires, recherche qui se penche sur l'auto perception qu'ont les diplômés de leurs possibilités d'insertion dans le marché du travail :
« Deux étudiants sur trois parmi ceux qui fréquentent les écoles de « haut » niveau, suivent d'autres cours, hors de l'espace scolaire, et moins de la moitié le fait dans celles de niveau "bas". Les langues sont l'activité la plus demandée parmi les premiers, et l'informatique parmi les étudiants des écoles "moyennes" et " basses". Il est important de remarquer que le besoin "d'acheter" la formation en informatique (car avec une langue étrangère c'est la formation considérée comme la plus demandée par le marché de travail) est lié au manque de ce type d'enseignement dans l'espace scolaire et l'impossibilité pour beaucoup de ces jeunes d'y accéder chez eux par manque d'équipement. Par exemple, presque la totalité (92 %) de ceux qui fréquentent les "hautes" écoles possèdent des ordinateurs chez eux ; tandis que dans les écoles "moyennes" la proportion se réduit à 62 %, et dans les "basses" écoles elle chute jusqu'à 29.9 %. »  [9]

     Actuellement, on peut observer des initiatives pour incorporer l'informatique (ou certains aspects) en lui donnant un statut disciplinaire. C'est ainsi que dans la Province de Buenos Aires, par la Résolution 6247/03, on intègre la matière « Technologies de l'Information et de la Communication » dans les cours de la première année du Polimodal  [10].

     Le sens donné à cette discipline est : « Le changement profond des règles du jeu dans les sociétés exige que les contenus d'enseignement proposés tendent à approfondir l'importance, les limitations et les perspectives de l'informatique et des communications dans l'actualité. Aussi, cet espace disciplinaire a pour objet de donner des connaissances et des compétences pour que les étudiants puissent sélectionner et utiliser le type de technologie de l'information et de la communication adaptée à chaque situation problématique, pour cela il est nécessaire d'introduire la dimension technologique dans les politiques éducatives démocratiques qui promeuvent la justice sociale et l'équité. »  [11]

     Bien que nous constations la mise en place d'un espace d'enseignement de l'informatique, c'est la seule référence que nous puissions identifier dans le projet disciplinaire du secondaire de cette juridiction  [12].

     D'une manière générale, nous observons que les principaux obstacles à son insertion se trouvent dans les espaces éducatifs où l'association avec le domaine professionnel ou le monde du travail n'est pas clairement explicitée.

La légitimation de l'informatique comme une discipline scientifique

     En général, la perspective scientifique de l'informatique est la dimension la plus faiblement considérée.

     Dans l'enseignement de l'informatique, on pense très peu en termes d'invariants disciplinaires. Dans la pratique, le vide conceptuel provoque la recherche incessante de nouveaux développements comme des objets pour enseigner. La séduction exercée par les supposées vertus des nouveaux développements commerciaux semblerait induire un besoin impératif d'en poursuivre l'actualisation comme une fin en soi  [13]. En reprenant les mots du sociologue Gilles Liposetsky : « L'indifférence croît. Nulle part le phénomène est plus visible que dans l'enseignement (...) C'est cet abandon du savoir qui devient significatif. »  [14]

     Sont aussi significatifs les obstacles qui interfèrent au moment de réfléchir sur les invariants disciplinaires :

  1. L'idée reçue, véhiculée par la publicité que font les entreprises, sur la transparence du maniement de l'ordinateur (sans reconnaître la diversité des programmes existants et la grande variabilité par rapport à leur complexité).

  2. La perception sociale, du fait que le seul acquis de l'informatique est ce qu'apportent ses propres représentations, ce qui est incompatible avec une réelle volonté de dépasser cette limite.

     Du point de vue idéologique, cette attitude donne une image de l'usager- consommateur, incapable de surmonter les limites qui lui permettraient de se positionner par rapport à la technologie, en profitant des potentialités que l'ordinateur et ses programmes offrent ou pourraient arriver à lui offrir.

     Jacques Baudé, président d'honneur de l'EPI (Association Enseignement Public et Informatique – France) l'exprime de cette manière :
« On nous dit encore, qu'il n'est pas besoin de savoirs savants, qu'il suffit de cliquer. Bel argument pour des marchands mais le rôle des enseignants n'est-il pas d'ouvrir ou d'entrouvrir, tant que faire se peut, les boîtes noires, de donner aux élèves les moyens de comprendre ce qu'ils font, de prendre du recul, et non pas d'en faire de simples consommateurs toujours dépassés ? »
(http://www.epi.asso.fr/revue/editic/jb-asti.htm)

     Un autre référent, qui permet de souligner le souci d'une approche de l'informatique comme objet d'étude à ce niveau, est le document  [15] (sans la légalité d'un programme) émis dans la juridiction du gouvernement de la ville de Buenos Aires, en 2002, pour les écoles qui, de fait, incluaient l'informatique dans leurs programmes d'études  [16]. Les grandes lignes en sont :
« ... Les contenus intègrent toujours la connaissance autour de l'ordinateur, les fonctions et les commandes des outils informatiques et les techniques de résolution de problèmes (qu'ils soient mathématiques, logiques, graphiques ou textuels). Ces contenus s'intègrent et s'appuient mutuellement. »

     L'organisation des contenus se réalise autour de trois axes conceptuels : les techniques informatiques dans le traitement de problèmes, les outils informatiques et leur maniement opératoire. Bien sûr l'approche vise à une intégration avec un volet disciplinaire mais comme en même temps elle est détachée de son organisation de contenus, la présence de l'informatique dans les écoles secondaires est extrêmement variable tant dans les domaines disciplinaires que dans son existence en tant que telle.

     De ce qui a été exposé, l'approche de l'informatique dans le secondaire dans ces deux juridictions correspond généralement à une vision fragmentaire. L'informatique a ainsi une tendance très marquée à se disperser, de telle façon, qu'il n'existe que peu ou pas de cohésion entre les différents aspects de la discipline.

Premières conclusions pour penser la didactique de l'informatique

     Dans ce travail, en partant de l'intention de dépasser des modèles empiristes d'apprentissage, nous présentons deux aspects à associer : le choix épistémologique et la reconnaissance. L'analyse ne s'est pas orientée vers la définition de contenus spécifiques, mais s'est inscrite dans un niveau plus vaste : considérer l'ensemble des connaissances qui constitueraient le champ de l'informatique pour réfléchir sur les bases de sa didactique dans le contexte particulier des écoles secondaires.

     En ce sens, la présence de l'informatique dans le curriculum apporterait une aide :

Aux professionnels (et spécialistes en didactique) concernés par l'enseignement de la matière, pour contribuer au processus de transposition didactique, en vue de :

  • Relever les conditions locales et spécifiques du contexte puisque la conjonction choix & légitimation n'est pas simple et doit tenir compte des besoins particuliers.

  • Évaluer le poids relatif qu'aurait chacune des approches (informatique associée aux compétences professionnelles et informatiques comme discipline scientifique) en fonction des besoins du contexte particulier et du choix épistémologique arrêté. D'où la nécessité d'expliciter et faire connaître ces choix.

  • Débattre de qui interviendrait dans le processus, en tenant compte de la place occupée dans la société et le rôle qu'il y assumerait comme acteur.

  • Constituer des groupes de recherche et d'étude abordant les problématiques du champ avec le propos de consolider un corpus de connaissances en fonction de la spécificité de la didactique de l'informatique.

Au politique pour :

  • Établir clairement les lignes d'une politique éducative pour incorporer et soutenir la place de l'informatique, en prêtant attention aux besoins en ressources humaines et en ressources matérielles.

  • Concevoir un cadre disciplinaire qui transforme en légalité la reconnaissance sociale de l'intégration de l'informatique, contribuant ainsi à réduire les inégalités liées à l'héritage culturel.

     Contribuer à la genèse d'un changement de paradigme qui concilie le choix épistémologique et la légitimation sociale peut être une voie pour l'obtenir. Cette reconnaissance explicite de la didactique de l'informatique comme un champ disciplinaire dans le cadre des Didactiques des Disciplines peut être un premier pas pour ouvrir le chemin...

     Nous remercions l'UNSAM (Université nationale de San Martín), le Comité Académique, le Comité Organisateur... pour nous avoir permis de développer cette communication dans le cadre de ces Premières Journées Nationales en Didactiques des Disciplines.

Silvina Caraballo,
scaraballo@filo.uba.ar

Rosa Cicala
rcicala@filo.uba.ar

Université de Buenos Aires
Faculté de Philosophie et des Lettres
Département Sciences de l'Éducation
Informatique et Informatique pédagogique

Bibliographie

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Artigue, M. (1990). « Épistémologie et Didactique » in Recherches en Didactique des Mathématiques, Vol. 10, nš 2.

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L'Association for Computing (ACM), l'Association for Information Systems (AIS) et la Computer Society (IEEE-CS) (2004). Computing Curricula 2004. Overview Report.

NOTES

[1] Nous faisons référence au projet CENEI (Centro Nacional para la enseñanza de la Informática – Centre national pour l'Enseignement de l'Informatique), appliqué par le Ministère d'Éducation et Culture, qui a commencé en 1980 et a fini formellement en 1995.

[2] Muraro, Susana, Una introducción a la Informática en el aula (Une introduction à l'Informatique dans la classe), Buenos Aires, FCE, 2005, p. 37.

[3] Muraro, Susana, Una introducción a la Informática en el aula (Une introduction à l'Informatique dans la classe), Buenos Aires, FCE, 2005, p. 42.

[4] Bérard, Jean-Michel. « Ordinateur et système éducatif : quelques questions » in Utilisations de l'ordinateur dans l'enseignement secondaire, Hachette Éducation, 1993, p. 144.

[5] Chevallard, Yves. La transposition didactique. Du Savoir Savant au Savoir Enseigné. Buenos Aires, édition Aique, 1997, p. 22 (édition française : La Pensée sauvage, Grenoble 1985).
L'auteur présente le savoir savant comme le savoir érudit, ce qui veut dire, celui des « spécialistes ».

[6] The Association for Computing (ACM), The Association for Information Systems (AIS) and The Computer Society (IEEE-CS). Computing Curricula 2004. Overview Report, novembre 2004.
http://www.acm.org/education/Overview_Draft_11-22-04.pdf.
Le rapport concerne l'éducation supérieure en Informatique aux États-Unis et au Canada.

[7] Polimodal (15 à 17 ans) : 3 ans d'un cycle d'enseignement post obligatoire, dans des « institutos », des « lycées » spécialisés, avec un tronc commun et des modules de spécialisation. C'est un passage obligé pour pouvoir accéder directement ou après examen à l'université.

[8] Ainsi, nous ne remettons pas en question la diversité qui existe et doit exister entre les écoles. Nous faisons référence aux connaissances et aux traitements d'une discipline que tous devraient partager.

[9] Filmus, Daniel, et al. Cada vez más necesaria, cada vez más insuficiente. Escuela media y mercado de trabajo en épocas de globalización (Chaque fois plus nécessaire, chaque fois plus insuffisante. École moyenne et marché du travail aux époques de la globalisation). Buenos Aires, édition Santillana, 2001, p. 131.
Les dates correspondent aux résultats d'une enquête menée auprès de 650 étudiants en dernière année dans 18 écoles secondaires situées dans la ville de Buenos Aires et les banlieue La Plata et Rosario. Dans l'étude, sont appelées « hautes » écoles, celles qui concentrent des familles dans lesquelles le chef de famille a un niveau universitaire et occupe une haute position dans la hiérarchie professionnelle ; « basses » celles qui en présentent un faible pourcentage ; « moyennes » celles dont la population est plus hétérogène.

[10] La matière s'introduit spécifiquement dans les modalités Économie et Gestion des Organisations et Production de Biens et Services, avec une charge horaire de 2 heures chaire hebdomadaire.

[11] Dans la restructuration des plans d'étude du niveau Polimodal a été élaborée la construction d'un curriculum pour le Niveau Polimodal.

[12] Cet espace curriculaire met en évidence la vision du paradigme basé sur les communications et Internet, décrit antérieurement.

[13] Nous n'excluons pas le besoin d'actualiser, mais nous affirmons que la décision d'adopter un nouveau développement informatique devrait privilégier les conditions qu'il offre pour aborder les contenus que nous voulons enseigner.

[14] Lipovetsky, Gilles, La era del vacío. Barcelone, édition Anagrama, 2002, p. 39. (édition française : L'ère du vide, Gallimard, 1989).

[15] Informática. Documento de trabajo (Informatique. Document de travail). Direction du Curriculum, GCBA, 2002, p. 6.

[16] En effet, le document prétend avoir « comme but d'offrir un cadre curriculaire pour ces instances de travail réalisées pendant les deux premières années des écoles moyennes qui s'occupent des contenus de l'aire d'Informatique ou de Computation, tant dans les cas dans lesquels se constitue comme une propre matière, un atelier, une offre de formation extra curriculaire, ou dans les cas où il s'agit du contenu d'autres matières comme : Mécanographie, Éducation Pratique, Pratiques Comptables, etc. ». Ça ne signifie pas l'obligation d'incorporer l'Informatique dans le curriculum des institutions éducatives.

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Association EPI
Janvier 2006

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