2008 : Les apprentissages fondamentaux en ITIC collège
ignorés - supprimés ?

Ignace Rak
 

   Les différents évènements et textes récents officiels font penser que la responsabilité des apprentissages fondamentaux en ITIC ne font plus partie des priorités politiques. Seules les certifications, par exemple celle du B2i, semblent être désormais la priorité, quitte à négliger les efforts financiers et pédagogiques souvent bénévoles des professeurs, donc à « brader » les résultats au risque de délivrer des certifications sans aucune garantie nationale de qualité.

En collège qui est responsable des apprentissages fondamentaux ?

   Le groupe ITIC de l'ASTI (Association française des Sciences et Technologies de l'Information) constate la discipline Technologie au collège a été chargée en 1996 par le Ministre de l'Éducation nationale d'assumer la responsabilité des apprentissages de base dans le domaine des TIC, dont 80 % servent à la validation du B2i. Les rapports de 2005 à 2007 et les études officielles, ainsi que le dernier sondage Internet auprès des membres de l'association des professeurs de technologie PAGESTEC confirment que cette discipline assume toujours la majorité de ces apprentissages. La Technologie est responsable ou coresponsable de la coordination du B2i (à 80 %) et intervient majoritairement (78 %) dans la validation des items du B2i  [1]. Ce Brevet Informatique et Internet est obligatoire pour la délivrance du Diplôme National du Brevet dès la session 2008.

   Or le nouveau programme en 6e de technologie de 2005 a pris l'orientation de supprimer les heures et les notions dévolues au traitement de texte et de projeter de réduire progressivement en 5e/4e/3e l'enseignement de l'informatique et des TIC à la seule approche « outil » sans horaire ni moyens particuliers.

   Il n'y a donc, depuis 2005 en 6e, plus aucune discipline responsable des apprentissages en ITIC. Et les nouveaux projets de programmes des disciplines du collège ne fixent plus ses responsabilités, y compris en technologie au collège.

Les derniers textes concernant la validation du B2i dans le nouveau diplôme national du brevet ne dévalorisent-ils pas la qualité de cette certification ?

   Le dernier texte officiel paru dans l'urgence le 27 décembre 2008 pour pallier à une réflexion politique didactique et pédagogique insuffisante  [2] réduit à néant l'effort de qualité jusqu'à présent mis en place par le texte règlementaire précédent : « Tout professeur peut valider les items constitutifs des compétences qui figurent dans les feuilles de position du B2i. La validation est réalisée tout au long de la scolarité. » et « Au collège, l'attestation est délivrée par le chef d'établissement sur proposition du professeur principal, après consultation de l'équipe pédagogique de la classe, lorsque 80 % des items (et au moins la moitié des items de chacun des domaines) sont validés. (...) Dans le cas contraire, les feuilles de position et tout renseignement complémentaire sont transmis au jury du diplôme national du brevet, qui se prononce sur la validation du B2i collège. Cette validation entraîne la délivrance de l'attestation du B2i. »

Les dernières déclarations sur les sites Internet ne soutiennent-elles pas, de fait, une dévalorisation des apprentissages, donc de la qualité des certifications ?

   D'abord le Café pédagogique par la voix de B. Devauchelle, qui semble plutôt soutenir la disparition des responsabilités des apprentissages assumées par la technologie au collège au profit d'une nébuleuse où toutes les disciplines seraient associées dans la validation mais sans aucune répartition des apprentissages  [3 ; 4]. Et il s'offusque, à juste titre, de la nouvelle décision du ministère de l'Éducation nationale de transférer au jury du Diplôme national du brevet la décision d'attribuer le B2i dans le cas où l'équipe des professeurs ne l'auraient pas proposé, dévalorisant ainsi le B2i lui-même, ainsi que le travail de l'équipe de professeurs  [5]. Il pointe, aussi, l'abandon très regrettable dans les nouvelles modalités d'attribution du B2i de la volonté de l'élève de se faire certifier lorsque ce dernier se juge prêt à celle-ci, item par item.

   Ensuite cette autre déclaration récente (4 janvier 2008) d'une autre association de professeurs de technologie, l'ASSETEC, qui ayant été reçue par la présidence de la république déclare en réponse au questionnement de J.-B. de Froment « ... comment nous situons l'utilisation de l'informatique dans les cours de technologie, (...) nous répondons que l'outil informatique n'est pas l'objectif premier de notre cours. Toutefois, au même titre que le français pour le littéraire, l'informatique est pour nous tous un outil, nous l'intégrons et l'approfondissons dans nos cours lorsque le besoin s'en fait sentir »  [6].

   Je pense personnellement que tant que l'on n'a pas clairement listé les connaissances à acquérir et désigné les disciplines responsables item par item d'une mission d'enseignement et de certification, on n'aura pas de véritable culture numérique, ni de qualité dans la validation du B2i.

N'y a-t-il pas confusion-glissement entre apprentissages et évaluations ?

   Il semble bien que ces derniers mois les décisions et déclarations diverses fassent une priorité aux modalités d'évaluation : référentiel de certification du B2i  [7], socle commun des connaissances et compétences  [8], expérimentation d'un livret de connaissances et de compétences  [9], feuille de position  [10]. Or, selon moi, il ne peut pas y avoir de certification sans un solide apprentissage préalable nettement identifié en termes de connaissances, capacités et attitudes si l'on reprend la définition adoptée par la structure du socle commun pour le concept de compétence.

   Voilà pourquoi on peut s'interroger aujourd'hui, en 2005 et 2007, sur l'abandon des apprentissages nettement formulés dans les programmes de collège de la discipline technologie, sans qu'il y ai eu une répartition de ces apprentissages entre toutes les disciplines.

   Autrement dit, peut-on certifier ce qui n'a jamais été appris ?

7 janvier 2008

Ignace Rak
Inspecteur pédagogique régional en Sciences et Techniques Industrielles Honoraire,
membre associé au laboratoire universitaire de recherche UMR-STEF, ENS Cachan.
http://perso.orange.fr/techno-hadf/bienvenue.htm.

Sitographie

[1] Sondage sur les conditions de validation obligatoire du B2i collège pour le diplôme national du brevet, année 2007-2008.
http://www.epi.asso.fr/revue/docu/d0801b.htm,
http://pagesperso-orange.fr/techno-hadf/edu/13-college_fr_2005-2010-6/ HADF_13_2_Sondage_PAGESTEC_B2i_obligatoire_2007-2008.doc.

[2] http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=MENE0773559A.

[3] Enseigner l'informatique pour mieux l'enfermer ?
http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2007/10/08102007Accueil.aspx.

[4] Il faut sauver le B2i...et les élèves
http://www.brunodevauchelle.com/blog/index.php?2007/12.

[5] B2i L'état renonce t'il à la culture numérique pour tous ?
http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2008/B2iBDevauchelle_08.aspx.

[6] Compte rendu de l'entretien du 27 novembre 2007 avec Jean Baptiste de Froment à la présidence de la république.
http://www.assetec.net/.

[7] Brevet Informatique et Internet (B2i) école collège
http://www.education.gouv.fr/bo/2000/42/encart.htm.

[8] Socle commun de connaissances et de compétences
http://www.education.gouv.fr/bo/2006/29/MENE0601554D.htm.

[9] Livret de connaissances et de compétences
http://eduscol.education.fr/D0231/experimentation_livret.htm.

[10] Feuille de position B2i collège
http://eduscol.education.fr/D0053/b2i-NivCollege.doc.

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Association EPI
Janvier 2008

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